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18 janvier 2015

Un dimanche dans la brume: à cheval en Normandie - 2

Un dimanche d'automne en Normandie. Mystère de la forêt dans la brume, visite d'un des plus beaux villages de France au pas des chevaux, découverte d'une nature qui se fait peintre impressionniste. Souvenirs d'une journée particulière.


Matinée brumeuse, journée heureuse


Réveil à l'aube irisée de soleil. Au matin venu, la brume a envahi la vallée que surplombe notre gite. Soudain, nous sommes transportés à haute altitude, surplombant les lointains sommets couverts d'une nappe blanche et les forêts de sapins cachés par le brouillard. Drôle de voyage. Ce village ici aime les briques roses, qui constituent la mairie et l'église voisines. La descente nous emmène alors vers un bon petit déjeuner. Car à l'Epicurie, tout est made in Normandy fabriqué en Normandie. Les croissants, le jus de pomme, les yaourts et les confitures: tout est local, et copieux!



Je retrouve Reyk, le fou furieux sympa qui me correspond bien, et adore être à l'avant. Enfin, il m'a tout de même fallu un peu d'aide pour le reconnaître et le retrouver au milieu de ses semblables...

Et quand nous partons pour randonner la journée, le chant des sabots remplace bientôt celui de l'eau. Plongés dans un cocon de coton, notre univers se restreint à cette lancinante musique, parfois ponctuée des cris mélodieux des oiseaux, et un paysage qui se révèle doucement au fil de notre progression. Comme un film qui se déroule, soudain apparaissent les blanches et noires vaches normandes, qui nous regardent circuler.

Alors, toujours enrubannés dans cet univers limité, une ambiance brumeuse qui préserve la légèreté du matin, nous empruntons les chemins des contrebandiers. D'abord nous faufiler pour éviter barrière et barbelés, et puis suivre le chemin le moins avenant, le plus inattendu. Une rude montée, une nature aux griffes acérées, de buissons bas et de ronciers. Comme s'il fallait nous dissuader de continuer. Seul un clin d’œil du soleil pour nous encourager. J'ai la sensation d'emprunter une porte dérobée, un accès réservé, me glisser par les coulisses pour me retrouver soudain au premier rang.


Surprise de l'émerveillement. La forêt fait alors de nous des privilégiés, et nous offre cet instant fugace. Les grands hêtres parés de leurs plus beaux atours d'automne, les feuilles qui ont déjà cédé à l'appel de l'hiver pour nous dérouler sur le sol leur tapis brun. Des arbres encore qui semblent des nains face à leurs géants voisins. Tous sont suspendus par la brume dans ce monde irréel qui les sublime. Les détails de la forêt qui se dessinent, contours tracés par un soleil unique, dont les rayons prennent forme dans les feuillages. Un halo de lumière qui fait d'un arbre un roi venu d'un autre monde. Dans le silence doré du matin, les rais de soleil laissent une trace dans l'air, vivants pourvoyeurs de l'esprit de la forêt, à la fois solides et insaisissables. Quand brume et lumière se conjuguent pour ne faire qu'une à l'ombre de la canopée.

Et quand soudain le brouillard se dissipe en une dernière nuée de gouttelettes scintillantes, l'azur pimpant de l'horizon s'étale à la tête des géants. Et des centaines de petits miroirs de verdure reflètent l'éblouissement de l'astre solaire. C'est ainsi que nous quittons la forêt des songes, un rêve éveillé pour un moment d'évasion cavalier.


Forêt vivante, forêt changeante, que nous découvrons en cette journée hors du temps. Des immenses hêtres aux longs et lisses troncs verticaux aux plus modestes arbres vêtus de bijoux automnaux, elle change à chaque détour. Ce premier trot dans une longue ligne droite dégagée, et juste après au cœur de la forêt, avant une étonnante clairière de verdure ensoleillée. Mon petit cheval qui donne et se bat pour ne pas se laisser dépasser, puis distancer par ce gros petit géant d'Irish Cob. Un galop plein d'élan, la forêt ouverte devant moi, et les percussions des sabots derrière moi.


Quand on arrive en ville


Alterner. Les longs trots énergiques et le pas qui berce. Soudain, les arbres lèvent le voile. Entre les buissons, la verte vallée ondule, et les taureaux nous saluent. Au détour d'un petit chemin forestier, soudain la route, inattendue, et le retour dans un village d'un dimanche matin. Lyons-la-Forêt, la belle, la surprenante, un des plus beaux villages de France.



Les uns derrière les autres, serpent équin, drôle de véhicule sur la route. Entrer dans le village par la "rue du bout du bas". Rue ensoleillée, tout en longueur, bond dans le temps. Voitures anachroniques face aux façades à colombages fleuries. Toits de tuiles plates à l'irrégularité d'assemblage propre à l'art d'autrefois. Le charme de l'imparfait.

Soudain, quitter la route pour parcourir un chemin étroit, les murs si près à les toucher, et laisser se faufiler les quelques passants rencontrés. Chemin en méandres, et un détour où notre hauteur  cavalière nous offre un regard unique sur de magnifiques arrières-façades tracées de bois. Ici, une simple maisonnette de briques rouges. Et le nom de ce chemin, si vrai et si évident, la "sente de derrière les jardins".

Brusque retour en ville, jour de marché. Le cœur vivant des lieux, marché au toit pentu simplement protecteur et charmeur, aux fleurs en boutonnière. Animation et passants, moto qui vrombit, et des chevaux au calme olympien. Et, alignées sagement dans leurs splendeur hautaine, les maisons-manoirs imposantes et leurs nombreuses fenêtres. Longer la route avec les claquements des fers en fond sonore, l'odeur des vaches avant de voir ce symbole de la Normandie, et alors savoir qu'on a quitté la ville.


Des cavaliers au marché

Toit normand
Déjà dans les bois, et Reyk qui accélère le pas, car il savait bien, lui, que c'est ici le galop. Avancer à fond seuls dans les bois, se perdre dans l'unique chemin au milieu des feuilles. Plus loin, un rappel du pays, croiser un centre équestre gigantesque, où les bâtiments succèdent aux pâtures et aux carrières, pourtant peuplés de bien peu d'équins. Un brusque changement de chemin, une brève mais rude montée, et une pause pique-nique avec vue sur les verdoyantes ondulations normandes.




Les nuances de la forêt


Aire de pique-nique avec vue
Quand l'automne commence à s'installer, doucement les ors et les bruns se colorent. Légères touches de rouges et d'orangés, et un doux vert qui semble délicatement s'effacer. Quand soudain, débauche de résistance, les verts sombres et les émeraudes des conifères viennent assaillir la quiétude automnale. Retour dans le temps. Mais c'est ici le royaume des feuillus, et la futile tentative des sapins de conserver l'été est vite oubliée en arpentant les chemins de la forêt. En son centre pourtant, elle abrite ses habitants, dont la pâle verdure perdure plus longtemps. C'est en sa bordure que la saison est la plus marquée. Les isolés de la lisière arborent avec fierté ses jaunes de paille et ses bruns terreux.


Le cavalier devra ici se jouer de la boue et des rondins de bois, avancer avec confiance sur des chemins tout en longueur ou parfois bien cachés. Il pourra alors apprécier sur des chemins bien connus de l'instinct de sa monture des galops de course effrénés, et ne jamais se laisser rattraper. Soudain une descente au trot un peu folle, quand l'effet de troupeau se faire sentir, et des gouttières régulièrement espacées que les chevaux franchissent avec agilité. Plus loin, galoper et laisser le cheval qui le sait si bien trouver le chemin.

Repos bien mérité
Parcourir en long et en large les étroits chemins de la forêt, et, tout à coup, reconnaître un autre point de vue sur un chemin déjà croisé. Alors, retrouver la rivière et la musique si particulière d'un pont métallique sous des sabots de fer. Et doucement, rentrer, tout simplement.




Merci à Patrice, Béa, mes compagnons de voyage et toute la troupe équine de l'Epicurie pour ce week-end automnal à cheval.

Alors, vous ai-je donner envie de visiter la Normandie à cheval?

Retrouvez d'autres images et récits de la Normandie à cheval par ici.

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16 commentaires:

  1. J'ai adoré! J'y étais, tes mots m'ont transportée,comme si je t'accompagnais et caralais à tes côtés, moi qui ne suis même jamais montée à cheval! Pourtant j'ai eu l'impression d'être à ta hauteur et tes mots sont si beaux, si éloquents sur la majestueuse nature, sur les chevaux, les vaches et tout que je te jure que j'y suis encore! ;-)) Merci ma belle!

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    1. Ce fut un plaisir de partager ainsi ce voyage avec toi Marie-France! Merci.

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    1. J'avais même pas vu la faute en le lisant la première fois ;-)

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  3. Tu as une façon tellement poétique de raconter les choses. On sent la fraîcheur de la brume tomber sur nos épaules. Très belle balade à cheval et au rythme de tes mots... Merci.

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    1. Merci, contente d'avoir de la compagnie dans mes balades!

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  4. C'est magnifique... Ca donne vraiment envie !!

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    1. Et en plus, l'accueil est au top. Mais c'est peut-être un peu loin de chez toi!...

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  5. Comme d'habitude, la poésie de tes mots nous fait voyager. Moi qui y était, je redécouvre ces chemins traversés aux douces couleurs automnales se découvrant dans la brume matinale ... Ah c'était trop top

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    1. Je crois que ce matin là fait partie de mes plus beaux souvenirs de rando. C'était quand même magique!

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  6. Très bien raconté !
    ça donne aussi envie de faire une balade Normande.

    Et j'adore la photo du toit normand, les couleurs sont superbes !

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    1. Merci. C'est vrai que quand je vois la couleur du ciel sur cette photo, je me dis qu'on a vraiment eu de la chance avec la météo ce jour là!

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  7. Ca valait la peine d'attendre la fin de tes aventures en Normandie ! Un régal de lire cet article, tu as le don de nous emmener avec toi !

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    1. Et en plus, c'est pas vraiment la fin, j'y suis retournée depuis :-)

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  8. "Je retrouve Reyk, le fou furieux sympa qui me correspond bien" je me disais aussi xD Les photos sont tellement cools !

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    1. Comment ça, tu te disais que j'étais une folle furieuse? :-O Mais c'est vrai, j'aime bien les chevaux qui avancent tous seuls :-P

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